Article expertise comptable - Revue de presse #18

Quelle justification apportée à la déduction d’une provision pour dépréciation d’un fonds de commerce ?


1. Les conditions de déduction d’une provision pour dépréciation

D’un point de vue fiscal, les immobilisations dont la perte de valeur n’est pas irréversible peuvent donner lieu à des provisions pour dépréciations dans les conditions prévues par le Code Général des Impôts (art. 39, 1.5° du CGI, ann. III art. 38 sexies). 

La déductibilité de ces dernières repose sur trois critères cumulatifs, à savoir la provision doit être :

  • constituée en vue de prévenir des pertes ou des charges précises ; 

  • justifiée par des évènements rendant la dépréciation probable ;

  • constatée dans les écritures de l’exercice (enregistrement comptable). 

Le Conseil d’Etat précise que la dépréciation d’un fonds de commerce peut donner lieu à déduction si et seulement si elle est conforme aux règles comptables. Autrement dit, il convient à la société d’établir que la valeur actuelle du fonds, soit la valeur la plus élevée entre la valeur vénale et la valeur d’usage, est inférieure à sa valeur nette comptable (CE 22 novembre 2022, n° 454766 ; voir FH 4033, §§ 1-1 à 1-9). 

Faute d’avoir démontré que la valeur actuelle du fonds était inférieure à sa valeur nette comptable, de nombreuses déductions de provisions ont été refusées par les cours administratives d’appel. C’est notamment le cas pour des fonds de commerce de radiologie (CAA Bordeaux 5 mars 2024, n° 22BX02971) et d’officines de pharmacie (CAA Marseille 7 mars 2024, n° 23MA00422).

2. La dépréciation du fonds justifiée par la baisse du chiffre d’affaires et du résultat net

En l’espèce, une SELARL a acquis, en 2010, le fonds de commerce d’une première pharmacie et partiellement le second. À partir de 2013 et après avoir constaté une baisse considérable du chiffre d’affaires par rapport à l’exercice 2008-2009 de référence, la société a comptabilisé une dépréciation de son fonds de commerce au titre des exercices 2013 à 2016. En 2018 et à l’issue d’un examen de comptabilité, l’administration fiscale a remis en cause la déduction de la provision pour dépréciation constatée à la clôture de l’exercice 2015. Déboutée de sa demande visant à conserver le droit à déduction de la provision pour dépréciation, la société a fait appel du jugement rendu.

Pour statuer, la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle que la constatation d’une dépréciation est soumise à l’analyse de la valeur du fonds de commerce à la clôture de l’exercice au titre duquel est constatée la provision avec la valeur nette comptable de celui-ci. Au cas d’espèce, la cour retient alors qu’il convient de comparer la valeur d’acquisition du fonds au moment de l’acquisition soit en 2010 avec le chiffre d’affaires et le résultat nets déterminés par les deux officines à la clôture de leurs précédents exercices (2008/2009). 

La cour rappelle également que l’utilisation d’études de la profession peut être retenue dans le calcul de la dépréciation envisagée du fonds de commerce. Autrement dit et même si elles ne sont pas suffisantes, un contribuable peut librement recourir à des données professionnelles dans le calcul de sa provision pour dépréciation. En outre, la cour estime, contrairement à l’administration, qu’il n’était pas nécessaire de prendre en compte l’excédent brut d’exploitation pour le calcul des provisions dès lors qu’il n'avait pas été retenu pour l'évaluation de la valeur d'acquisition.


Source : « « TUP » et dissolution amiable : incidences des nouveautés à compter du 1er octobre 2024 » – Revue Fiduciaire – 03/10/2024.

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